Boum Boum, musique sans âme, musique de sourd, Techno = disco=dance machine, rave=drogue party, etc...etc... Il semblerait bien que le mouvement techno soit, encore aujourd'hui, pris pour un dangereux OVNI par ses contemporains...pas si contemporains que ça ! What is techno ? D'où vient-elle ? Voici un peu d'histoire pour y voir plus clair et calmer les esprits.Le big-bang techno se situe au milieu des années 80 avec l'apparition de la house-music (Le "house" vient du fait que cette musique était jouée dans un club chicagoan, le "Warehouse"). Il s'agit alors d'une disco complètement dépouillée de ses gimmicks, de son strass (violons, voix aigues ...) où le kick (ou pied ou grosse caisse), le charley et la basse (synthétique) sont mixés très en avant. Résultat : gros gros son, groove surboosté et succès immédiat dans les clubs blacks de Chicago et Detroit puis N.Y., Londres, Berlin, Bruxelles Paris, etc... Certains techno-historiens, peut-être un peu plus rêveurs, situent la genèse de cette musique, également dans les années 80 mais dans la région de GOA, une province indienne, version eighties de Katmandou. Là, auront lieu les premières raves... C'est le versant psychédélique de techno. D'ailleurs, on retrouve dans la techno, différents courants/comportements explorés par le rock (planant//ambient, hard rock//hardcore, punk US//techno US, psyché//goa, progressif//trance, jazz-rock//latin&jazz house, etc...). Cette musique quasi-exclusivement électronique est en rupture avec plusieurs schémas de composition /représentation utilisés dans la musique populaire : disparition du couplet-refrain, relative absence de voix et de narration chantée, DJ comme interprète privilégié et non plus le compositeur ou le chanteur, usage essentiellement festif. Dans un premier temps, le refus du star-system, voire l'anonymat, a également été une règle basique du mouvement techno. Si la musique populaire occidentale a connue une importante mutation avec l'électrification des instruments (rock'n'roll), elle est entrée dans l'ère électronique avec la techno. Meanwhile, back in the states. La house se radicalise, "s'acidifie". De + en + de musiciens,noirs en général, influencés par certains groupes de musique électronique, Kraftwerk notament, utilisent maintenant des instruments (devenus mythiques mais très bon marché à l'époque) tels que les boites à rythmes Roland TR909 et 808 ou la TB303 bassline, un composeur de lignes de basse détourné en générateur de sons électroniques chatouilleurs. Ajoutez à çà un synthétiseur, un sampler, un enregistreur 8 pistes et whiiiizzzz, pour une poignée de dollars, vous deveniez l'heureux détenteur d'un studio d'enregistrement ou plus précisément d'un home-studio (House-studio ?). Ainsi toute une génération de musiciens autodidactes, plutôt versée dans le groove a pu distiller et diffuser un nouveau son, sans avoir à dealer avec la grosse machinerie des major companies qui de toute façon n'y aurait certainement rien entendu. Un peu l'équivalent de l'auto-production des groupes rock alternatifs mais transposée dans le contexte noir américain. C'est donc le groove -plutôt noir et plutôt américain-s'accouplant avec des sons et des rythmes électroniques-plutôt blancs et plutôt européens- qui vont engendrer la house music. A cette époque pourtant, la musique noire que tout le monde plèbiscite, c'est le rap, qui, à force d' extremisme et de clichés, finit par s'auto-complaire dans un ghetto musical et idéologique duquel il a du mal à s'extraire (même si le rap reste plus "vendeur" que la techno). La House a donc donné naissance à un nouveau courant l'acid-house, et commence à cette époque- fin des années 80 à secouer l'Europe. En Belgique, berceau du mouvement électro/industriel, en Angleterre, notament dans des villes hooliganogènes telles que Manchester, à Berlin, à Ibiza, on assiste au début du raz-de-marée techno. En France, la House sort peu à peu des clubs gays mais reste un phénomène très underground. Le débat sur la mort du rock est clos depuis déja une poignées d'années. D'ailleurs la musique pop du moment (New Order, Human League, Soft Cell, et surtout Dépêche Mode) de même que certains groupes beaucoup plus experimentaux (Throbbing Gristle/Psychic TV /Chris &Cosey/Coil, Cabaret Voltaire) annoncent clairement le mouvement techno. Mais qu'est-ce qui fait donc courir ces House music lovers ? La House ou la Techno proposent, le temps d' une soirée, un coktail, dosé différement pour chacun, de danse/ecstasy/séduction/transe/bain de foule et surtout d'action, à l'opposé du cocooning ambient ou de la passivité du public rock moyen planté béatement devant ses idoles électriques. La nuit étant, on le sait, un espace temporel beaucoup plus libre, les fêtes House et les raves se déroulent très tard dans la nuit. Les premiers amateurs de techno viennent d'horizons très variés mais principalement des mouvements cold-wave/électro/industriel et d'une partie du public "club" à la recherche de nouvelles vibrations. Au début des années 90, la techno se ramifie en différents courants : House, Garage, Trance, Hardcore, Ambient chacun donnant naissance par la suite à de nouvelles branches (Hard-House, Latin House, Hard-trance, Goa Gabber, Jungle, Trip-Hop ...). La techno devient une (sub)culture avec ses rites, ses codes vestimentaires, graphiques et sémantiques. Et s'il fallait définir cette technoculture, on pourrait dire qu'elle mixe clubculture, streetculture et cyberculture avec un zeste de contre-culture. En France, le mouvement reste marginal notament par la mauvaise réputation dont il "jouit" dans la presse. En tant qu'expression spontanée, indépendante de toute institution, il est évidement la cible des politiques. Face à un harcèlement policier digne des années 60/70, le mouvement s'affaiblit légèrement mais la machine est lancée et une certaine forme de récuperation (major companies, médias, organisateurs, sponsors) apportent à la techno une respectabilité dont elle n'avait évidement pas besoin. Aujourd'hui, le phénomène techno est entré dans l'âge adulte, ceci impliquant toujours plus de créativité et d'ambitions, mais ô combien moins d'innocence et de spontanéité.
Ch. DeZert (10/02/96).